vendredi 25 décembre 2009

"L'or se hissera à 2.000 dollars, mais les actions vont rechuter"

"L'or se hissera à 2.000 dollars, mais les actions vont rechuter"

Gérant de fonds de hedge funds à Lyxor (filiale de la Société Générale), Thierry Béchu a eu le nez creux en anticipantdès février un renchérissement de l'or et du pétrole, ainsi qu'une phase de reprise technique des marchés actions. Les investisseurs s'étant placés à ce moment sur ces actifs ont en effet réalisé à ce jour des gains de 9%, 95% et 43% respectivement. Le membre fondateur del'Association Française des Analystes Techniques(AFATE), qui vient de publier le livre "Economie et marchés financiers, perspectives 2010-2020", est désormais beaucoup plus prudent sur les grands indices boursiers, dont le potentiel est limité. Il reste toutefois confiant sur les matières premières, qui s'inscrivent dans un vaste mouvement haussier de long terme. Méfiant sur les actifs traditionnels, il préconise de privilégier les valeurs tangibles pour la décennie qui s'annonce.

Capital.fr : La conjoncture économique tend à se stabiliser. Tablez-vous sur une reprise durable ?

Thierry Béchu : La croissance constatée depuis le troisième trimestre dans les pays développés aura du mal à se poursuivre au-delà de l'été 2010, car elle est due à un phénomène de restockage et aux aides massives des autorités. Le risque d’un double dip [rechute de la conjoncture, après une première phase de reprise, NDLR] est élevé. L'Etat soutient artificiellement l'économie via la prime à la casse automobile et des mesures fiscales, mais ces leviers vont progressivement disparaître. Le chômage reste élevé outre-Atlantique, à 10%, tandis que les ménages, frileux, augmenteront leur taux d'épargne, ce qui ponctionnera la consommation.

Capital.fr : La situation de l'Europe est-elle différente de celle des Etats-Unis ?

Thierry Béchu : Oui, car les cultures ne sont pas les mêmes. Les amortisseurs sont plus forts en France et en Allemagne qu'aux Etats-Unis, ce qui nous permet de mieux encaisser les chocs. La croissance hexagonale mettra toutefois plus de temps à repartir. L'Europe, empêtrée dans des problématiques inter-Etats membres, semble incapable de prendre des décisions rapides et suffisamment drastiques. Une prudence qu'on retrouve dans la politique monétaire de la zone euro. Plus sagement gérée que le dollar, la monnaie unique bénéficie d'une plus faible croissance de la masse monétaire qu'aux Etats-Unis. La zone euro est cependant hétérogène, avec des pays aux fondamentaux très différents. Même s'il est prématuré de tabler sur un éclatement de la région, le risque ne peut être exclu et gouvernera par périodes les variations de la devise européenne.

Capital.fr : Faut-il craindre un retour de l'inflation, compte tenu de la forte création monétaire ?

Thierry Béchu : La masse monétaire explose depuis la crise et cela pèsera mécaniquement sur la valeur des devises concernées. Cela devrait se traduire à terme par de l'inflation. Pour l'heure, les prix restent stables, et c'est étonnant, dans la mesure où on vient de connaître une des pires récessions depuis la seconde guerre mondiale. La chute brutale de la production industrielle aurait pu provoquer une déflation. A moyen terme, c'est pourtant l'inflation qu'il faut craindre, en raison du renchérissement attendu des matières premières, de la hausse des coûts liée à la multiplication des réglementations et du retour du protectionnisme.

Capital.fr : Un investisseur doit donc privilégier les biens tangibles ?

Thierry Béchu : Pour la décennie à venir, il faut en effet préférer l'or physique, les mines d’or et les matières premières, mais aussi les terres agricoles, les forêts et l'immobilier.

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